Des vacances à la « chat-chat »

Voici l'histoire d'une semaine de vacances passée au Centre de nulle part, dans un endroit isolé, perdu au beau milieu de la montagne. Là haut, tout s'y déroulait au ralenti. Lorsqu’un jour, deux êtres humains sont passés sur le chemin devant notre maison, nous en sommes restés saisis d’étonnement ! La civilisation existait donc encore quelque part ? Cette journée grâce à cette vision sera pour nous la plus belle de toutes. Ces randonneurs, tels des samaritains, en passant près de notre porte nous ont transmis un espoir, un signe, une marque d'espérance. Ils nous ont rappelé que la vie existe toujours, que le monde est là encore, que nous ne devons pas désespérer, que l'humanité respire quelque part et reprendra pour nous aussi à la fin de ces vacances !

C'était l’été, le temps du « lâcher prise ». Nous ignorions à quel point ce serait le cas ! Nous devions être gais, heureux, légers, optimistes et enjoués pour bien amortir ces congés. Aussi, en arrivant le premier jour devant cette maison louée pour une semaine seulement (heureusement !) avons-nous eu que des pensées positives. J’en ai eu un tas qui me sont venues à l’esprit, du genre « les chats vont être heureux » « ils vont être bien » « ils vont pouvoir sortir » « c’est calme ! On va pouvoir se reposer»...

Au matin du deuxième jour, nous commençons nos vacances à la chat-chat. Ils sont tous les deux en boule sur les canapés, morts de trouille et nous complètement ramassés chacun dans notre lit, morts de froid. Il fait 10° dehors. Nous pensions qu’en Espagne au début du mois d’Août, il faisait meilleur qu’en Bretagne. Et bien non ! Nous avons la même température et la pluie qui va avec. Le brouillard de la montagne nous bouche la vue et dans la maison rustique que nous occupons, le chauffage n’a pas été installé. Que du bonheur !

La maison est bien conçue. Quatre chambres, un salon à l’étage et une salle de bains avec toilettes. La cuisine est au rez de chaussée et comprend un coin pour déjeuner.

Côté confort, c’est un peu léger. Il n’y a qu’un robinet au lavabo de la salle de bains, et de quoi se fêler les dents quand on se les rince tellement l’eau est froide.

Les toilettes sont dans la salle de bains. Il faut donc être bien organisés lorsque l’un de nous décide de prendre un bain. Il n’y a pas de sanitaire au rez de chaussée mais les champs alentours s'offrent à nous... au besoin ! Soyons honnêtes, l'ensemble est correct. La baignoire sabot est adorable.

Dans la cuisine, les restes d’une cuisinière d’antan au charbon a été conservée en guise de souvenir. C’est charmant. La nouvelle cuisinière marche au gaz. Je prie chaque jour pour que nous n’ayons pas à changer la bouteille. J’aime la rusticité des choses jusqu’à un certain point. La rupture soudaine de gaz au moment des préparatifs du dîner surtout quand on cherche à se réchauffer avec une bonne soupe a tout d'antan mais rien de charmant.

De ma fenêtre, je vois une maison habitée. Située à une bonne distance de la nôtre, elle fume de tous ses conduits. Il doit y faire bon vivre ! Un feu d’enfer réchauffe les heureux occupants de ces pièces voisines que seuls quelques dizaines d'arbres et un chemin nous en séparent. Il peut parfois être bon de vivre à l'année dans un coin à ce point oublié quand l'eau chaude est là et que des feux crépitent dans la cheminée !

L’après-midi du deuxième jour, le soleil a daigné se montrer. Nous nous risquons dehors de temps en temps. Malheureusement, le vent oblige à des sorties rapides. Le soleil chauffe mais le vent est très frais en montagne. Dommage. Il n’y a pas de salon au rez de chaussée où nous réunir. La cuisine est quasi aveugle. Aucune vraie lumière du jour ne pénètre. Il n’y a que la porte d’entrée qui permette un accès vers l’extérieur.

Après que le soleil ait bien joué à cache-cache avec nos nerfs, nous renonçons à l’attendre et retournons nous blottir.

Je trouve toujours d’une manière générale que le temps passe beaucoup trop vite. Ici, pas du tout. C’est au moins un avantage, on n’a pas l’impression de vieillir...

L’après-midi passe ainsi à aller dehors et vite retourner dans son lit à dormir, lire, écrire, jouer à l’ordinateur. Heureusement qu’on a pensé à les emporter ! Allez, une semaine, c’est pas bien long ! ça permet un retour sur soi-même, une analyse des choses, une bonne appréciation et une réévaluation de ce qu’on aime vraiment et de ce qu’on n’aime pas.

Troisième jour. Pas de corde à linge dans le jardin. Néanmoins, il y a une machine à laver que je désire utiliser. Puisqu’il n’y a pas grand chose à faire, autant gagner du temps sur la rentrée et commencer les lessives. Le grand vent sèchera le linge. La machine est mise en route un soir et tourne pendant que chacun de nous s’occupe avec son ordinateur. Soudain, tout devient noir. Evidemment, nous aurions dû nous en douter. Une machine à laver et quatre ordinateurs qui fonctionnent en même temps, ainsi que l’éclairage de quatre chambres et c’est la plongée dans le néant ! Impossible de remettre le courant. Couchage forcé à vingt et un heures trente. Il faudra attendre le lendemain matin et désamorcer la pompe du puits pour pouvoir remettre le disjoncteur en place et retrouver la lumière.

Quatrième jour. Finalement, on s’habitue à cette vie au ralenti, à ne rien faire, à regarder vivre les chevaux, les vaches, qui ne font rien de plus que nous. Ils supportent juste mieux le vent frais et l’absence de soleil.

Cinquième jour. Le temps ne se lève pas. Nous décidons donc de faire un effort et de sortir de la maison. Nous programmons de partir en voiture sitôt le déjeuner avalé, direction l’horizon où il y a du soleil. Manque de chance, une vétille au déjeuner met le pater familias dans un de ses jours de mauvaise grâce, encore plus sombre que tous ceux que nous venons de vivre. Comme à l’accoutumée dans ce genre de situation dont on ne s’habitue absolument pas, la bouderie plombe l’atmosphère, l’horizon, l’air. Pour un peu, il ferait presque plus beau dehors… Les autres membres de la famille, rompus à ce genre de situation, savent qu’il n’y a rien à faire qu’attendre… et surtout ne RIEN dire… c’est ce que nous faisons.

L’orage, l’ouragan, la tempête… que sais-je encore qui cette fois circulent sous le crâne, au milieu des neurones poursuivent leur chemin pour combien de temps ? nous l’ignorons. Sortirons-nous finalement ? Mystère. Je décide de faire une sieste. Ce sera, une nouvelle fois, toujours ça de gagné. « Gagné » sur quoi et pour quoi ? je l’ignore.

Finalement, l’averse ou le tsunami interne aura duré jusqu’à 15 h 30, heure à laquelle nous partirons enfin voir le soleil.

De toute façon, dans cet endroit ravitaillé par les corbeaux, nous n’avions rien d’autre à faire…

Le sixième jour sera le plus beau de la semaine puisque nous partons enfin. Départ de la maison à 8 h 30 le matin. Adieu maison, veaux, vaches, chevaux… Continuez sans nous !

Je n’ai jamais aimé les maisons isolées, la vie à huit clos, en autarcie. Il est absolument impossible de nos jours de vivre ainsi à l’écart de tout. Une telle vie repliée impose de la part de chaque membre de la famille une attitude tournée vers l’autre, vers le partage. Cela nécessite à chaque seconde, d’être attentionné, prévenant, souriant car l’ambiance peut facilement et très rapidement devenir électrique même si les jours précédents, tout s’était plutôt bien passé.

Catherine Avrin
Août 2009

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